Karine
Grosso,
pianiste
Crinière blond vénitien,
Karine est bien
méditerranéenne, sa
famille est venue d’Italie
habiter Tunis, Carthage,
pour passer ensuite la
Grande Bleue et
s'installer en France à
Grenoble.
J'ai eu envie très tôt de
faire de la musique. Un
jour, j'avais cinq ans, j'ai
écouté le générique
d'Apostrophes, le 1
er
Concerto de
Rachmaninoff, celà m'a captivée. Personne en
fait n'était musicien dans ma famille, mais j'en
avais tellement envie, j'ai commencé à sept ans,
au Conservatoire de Grenoble, et depuis je n'ai
jamais cessé de jouer.
J'ai fait mes études à Grenoble, d'abord à
l'Externat Notre-Dame pour le secondaire, puis au
Conservatoire. Ensuite, à Valence, où j'ai obtenu
ma Médaille d'Or, ce qui constitue le diplôme de
fin d'études musicales. Et là en réalité, tout
commence. Avec des rencontres, des gens du
métier, je voulais diversifier mes sources, mes
influences, connaître des mentors différents. Je
suis allée à Paris prendre des cours avec un
professeur brésilien. Puis en Suisse Italienne à
Lugano, où j'ai étudié en perfectionnement au
Conservatoire.
Mais mes nourritures
ne sont pas seulement
celles du métier. La
nature aussi m'apprend
des choses. Me
promener, faire du ski,
même si j'en fais mal,
regarder les saisons… Et
je suis maman d'une
fillette de sept ans. Anaïs,
qui fait un peu de piano,
mais surtout de la danse
classique, au petit
conservatoire de
Grenoble, cela aussi me
nourrit.
Pourquoi être venue vous
installer en Trièves?
D'une façon un peu
irrationnelle, je me sentais
"appelée" ici.
D'abord beaucoup de gens
d'ici m'ont inspirée, par leur
humanité, leur beauté. J'ai fait
des rencontres magiques,
Patricia Cugnod, médecin à
Monestier, qui a créé
l'Association Musique
Ensemble (AME).
La famille Vernier, Nathalie et Marco, Nathalie est une ancienne
élève. Les Snyman, Virginie, Salomé, Clémence. Et Patrice, qui
m’est proche, quelqu'un de très pratique, mais aussi bon
musicien. Bénédicte, qui est maintenant notre présidente.
Plus concrètement, je travaillais à l'école de l'AME à Monestier
de Clermont. Et puis élever Anaïs au contact de la nature, c'était
une évidence. Qu'elle sente cette liberté de mouvement qui n'est
possible que dans des
lieux comme Saint
Martin. L'école aussi
est magnifique. Les
institutrices et leurs
aides font un travail
superbe, très créatif,
elles ont beaucoup de
liberté et d'initiative,
qu'elles communiquent
aux gamins. Les petits
sont venus ici, vous
savez, ils ont découvert
les pianos…
Tenez justement, nous
travaillons en ce moment sur un projet scolaire, en
rapport avec l'Equipe Mobile Académique de Liaison et
d'Animation (Emala), sur la création musicale. L'idée est
de faire venir un compositeur qui se joindra à nous pour
créer de la musique, en associant les enfants à cette
aventure. Tout cela pour aboutir à un concert d'ouverture du festival en 2016,
c'est encore loin…
La culture, plus que jamais, est fondamentale. Et dans cet ensemble, la
musique génère toutes sortes de choses bonnes à vivre : création, écoute,
respect de l'autre, respect des rythmes, celui des autres, le sien propre, c'est
une exploration partagée, une aventure humaine.
Mes élèves viennent ici, c'est un bel endroit où faire de la musique. La plus
petite a quatre ans, elle a démarré à trois ans, le plus âgé… a à peu près votre
âge !
Parlez-nous des concerts…
Jouer en concert, c'est partager, mettre en commun son rythme propre avec
celui des autres, du public. Dans les moments de silence on ressent l'énergie
de la salle, en fait même en solo on ne joue pas seule, le public peut vous
porter, interagir avec vous, et son énergie peut varier d'un moment à l’autre.
Certains lieux sont chaleureux, d'autres moins. C'est palpitant, on ne sait jamais
ce qui va se passer, si la magie va passer, on travaille pour ça en fait, pour
essayer de retrouver cette magie, ce que les jazzmen appellent la note bleue.
Je fais des concerts dans la région bien sûr, et en France, en Suisse
également, mais j'aimerais jouer à l'étranger. C'est un des propos du Festival
de piano que nous avons créé : faire venir ces artistes qui inspirent.
Mes compositeurs préférés ? Shostakovich, Mozart, Bach. Mais en réalité on
aime des compositeurs en fonction des périodes de sa vie, à un moment je
détestais Schumann et j'aimais Chopin, puis ç'a été l'inverse. En fait je
schématise, les choses sont
beaucoup plus nuancées, le
choix d'un compositeur ou d’un
autre reflète souvent les états
d'âme de l'interprète à un
moment donné.
Mes projets ? Faire monter le
festival en puissance,
communiquer, trouver d'autres
concerts, élargir mon public, au
Trièves, bien sûr, mais aussi
bien au-delà. Pour mes élèves,
aussi, j'aimerais organiser un
concert à St Martin, ici. Un
récital, pourquoi pas, que mes
élèves puissent jouer devant un
public…
En mai, j'organise un stage, je pratique le yoga,
les techniques de respiration, et j'entends partager
cette expérience —en toute humilité je ne suis pas
yogi— pour travailler un instrument. Pour contacter
l'énergie, la canaliser, être présent à l'instant. Le
yoga et son aspect méditatif permettent de faire le
lien entre le spirituel et le charnel, l'abstrait et le
concret. Plutôt que comment je vais faire, se
demander comment je vais ressentir.
J'aime aussi l'idée de créer des opportunités de
jouer à plusieurs, et j'attends avec impatience
ces quatre jours de stage à Monestier de
Clermont autour du 17 mai…
Propos recueillis par
Bernard Moro
et Paul Riondet,
13 janvier 2015
Cliquez ici pour aller
voir le site de
Karine.
Aussi, sa page
Facebook.
Et enfin la page de son
concert en l’église de
Saint Martin.
Karine nous déchiffre le
début d’une Fantaisie
de Schumann...
Oui... c’est frustrant quand elle s’arrête...